vendredi 13 mars 2015

Quand nous travaillons ensemble, nous pouvons faire trembler la terre pour la paix et les droits

Déclaration de la Rencontre des Plateformes et Mouvements Sociaux pour la Paix. 

Bogotá, 10 mars 2015.
Quand nous travaillons ensemble, 
nous pouvons faire trembler la terre 
pour la paix et les droits

A Bogotá, le 9 et 10 mars 2015, nous nous sommes réunis, environ cinquante délégué-e-s de neuf plateformes de défense des droits humains et de la paix et mouvements sociaux, accompagnés de quelques agences de coopération qui travaillent en Colombie. L’objectif était de réfléchir ensemble sur notre rôle dans la construction de la paix et, plus concrètement, en ce qui concerne la possibilité que se concrétisent les accords entre le Gouvernement National et les groupes insurgés des FARC et de l’ELN.

Nous remercions pour leur participation à cette rencontre : Le père Javier Giraldo S.J. membre de la Commission Historique du Conflit et ses Victimes, Piedad Cordoba du mouvement « Colombiennes et Colombiens pour la paix », le chercheur Ricardo Vargas, Yenly Angélica Méndez et César Jérez de l’Association des Zones de Réserve Paysanne ANZORC, Claudia Mejía Duque, Marina Gallego et Olga Amparo Sánchez du Sommet des Femmes pour la Paix. Ils ont partagé leurs réflexions sur différentes dimensions des pré-accords atteints à ce jour. Cette rencontre a également reçu les salutations des guérillas des FARC et de l’ELN et le Haut Commissaire à la Paix, Sergio Jaramillo, a été invité formellement, sans que sa présence se concrétise.

Nous, réseaux de défense des droits humains et de la paix, organisateurs de la rencontre, avons fait une lecture analytique des pré-accords atteints à la table de conversations de la Havane et nous avons souligné les avancées importantes sur la question agraire, les garanties pour l’opposition politique, l’incorporation de la perspective du genre et la reconnaissance des droits des victimes. Nous évaluons positivement le travail de la sous-commission du Genre et la reconnaissance de thématiques cruciales comme la discrimination et l’exclusion politique, sociale et économique des femmes qui sont des composantes fondamentales de la construction de paix.

Nous reconnaissons positivement et saluons l’accord sur le déminage comme pas significatif pour réduire les effets de la guerre dans la vie des communautés, ainsi que la récente annonce gouvernementale d’arrêt des bombardements des campements insurgés des FARC-EP, actions qui doivent conduire au cessez-le-feu bilatéral définitif réclamé par la population civile colombienne.

Au-delà des avancées, nous sommes très préoccupés par des situations structurelles comme le modèle de développement extractiviste, la poursuite de politiques de sécurité à dominante militariste et la persistance du paramilitarisme : A cause de tout cela, ce qui est considéré comme des avancées peut être une illusion. Sans une solution à ces problèmes, on courre le risque que les éventuels accords soient trahis.

Dans ce sens, des lois comme le Plan National de Développement devraient s’orienter vers la mise en œuvre d’une partie des accords et, de toute façon, devraient refléter un regard plus démocratique et citoyen de construction du pays. Dans le Plan, les contradictions avec les pré-accords atteints à La Havane devraient être éliminés et les moyens nécessaires devraient être destinés tant pour garantir une pédagogie de la paix à partir des territoires et des communautés, comme pour mettre en pratique les accords. Actuellement, tel qu’il est conçu, le Plan National de Développement ne contribue pas effectivement à la Paix.

Conformément aux objectifs de notre rencontre, en tant que réseaux des droits humains et de la paix, nous proposons :
1.  D’approfondir notre articulation comme mouvement pour les droits humains et pour la paix, en reconnaissant la pluralité, l’interculturalité et les sensibilités diverses dans la construction de la paix.
2.     De développer une campagne de sensibilisation nationale pour promouvoir le soutien de la société colombienne aux processus de dialogue. Pour ce faire, nous proposons de créer une commission pédagogique qui développe des outils, des messages et qui incorpore des nouveaux langages permettant d’engendrer un meilleur accompagnement social des processus de négociation en cours.
3.    Les médias jouent un rôle prépondérant dans l’opinion publique. C’est pourquoi nous proposons d’impulser une rencontre des médias alternatifs et populaires, et avec eux, de diffuser les accords et la construction de paix.
4.   Nous prenons la date du 9 avril comme journée de mobilisation nationale incorporant des éléments symboliques pour promouvoir une expression citoyenne massive en soutien aux processus de dialogue.
5.  Nous diffuserons par tous les moyens (mécanismes et outils) le rapport de la Commission Historique du Conflit et ses Victimes.
6.    Nous proposons d’organiser une audience publique qui permette de divulguer les témoignages et expériences des 60 victimes qui ont participé aux rencontres des victimes à La Havane.
7. Nous approfondirons les discussions sur la Justice Transitionnelle afin de construire une proposition à partir de la perspective des droits humains et de la concrétisation des droits des victimes. La garantie de non-répétition des crimes est le fondement de la paix.
8.    En tant qu’organisations pour la paix, nous considérons que nous devons continuer à interpeller des secteurs de la société qui pourraient avoir un rôle actif dans la construction et le soutien aux dialogues de paix, comme les églises, les médias, les mouvements, les partis politiques, les secteurs des entreprises, entre autres.
9.  Nous réaffirmons l’importance et la richesse des diverses initiatives de construction de paix construites par les communautés dans les territoires et nous invitons à les soutenir.
10. Nous insisterons sur la nécessaire désarticulation des causes structurelles du conflit, liées à l’injuste distribution des biens et services, ainsi que sur l’absence de justice restitutive. Cette injustice profonde est liée au paramilitarisme, à la doctrine de la sécurité nationale et au concept de l’ « ennemi interne ». Démonter ces structures et ces doctrines est la condition de la possibilité de garanties de non-répétition pour une paix stable et durable.
11. Les avancées du Processus National de Garanties du gouvernement avec les organismes de défense des droits humains et les membres de la communauté internationale, doivent être harmonisées avec les propositions de protection du mouvement social qui ont surgi à la Table de La Havane. On devrait prévoir un mécanisme d’urgence de nos organisations de défense des droits humains pour répondre aux situations de criminalisation et de répression des protestations sociales
12.  Nous continuerons à favoriser l’adoption d’une Politique Publique des Droits Humains comme contribution à la construction de paix.

Signé par :
  • Plateforme colombienne des Droits Humains, Démocratie et Développement.
  • Coordination Colombie Europe Etats-Unis – CCEEU
  • Alliance des organisations sociales
  • Mouvement National des Victimes de Crimes d’Etat
  • Communautés constructrices de paix dans les Territoires – CONPAZ
  • Réseau des Initiatives pour la Paix et contre la guerre – REDEPAZ
  • Association des Zones de Réserve Paysanne – ANZORC
  • Clameur Sociale pour la Paix
  • Dialogue Interécclésial pour la Paix en Colombie – DIPAZ – Colombie
  • Colombiens et Colombiennes pour la Paix

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